I. INTRODUCTION
En date du 9 août 2022, les membres de la commission permanente chargée des questions institutionnelles, juridiques et des droits et libertés fondamentaux se sont réunis pour analyser le projet de loi dont l’objet est repris ci- haut.
La séance a été marquée par la présence du Ministre de l’Intérieur, du Développement Communautaire et de la Sécurité Publique qui avait représenté le Gouvernement pour présenter le projet de loi aux membres de ladite commission et les éclairer sur les aspects les plus importants.
Lors de l’analyse du projet de loi, les sénateurs membres de la commission saisie au fond se sont servis des documents ci- après :
Le présent rapport comprend les points ci-après :
II. INTERET DU PROJET
La loi n° 1/ 35 du 31 décembre 2014 portant cadre organique des confessions religieuses est claire quant à la procédure de leur agrément et à leur fonctionnement.
Mais curieusement, certaines ont déraillé de l’objectif principal de donner à leurs fidèles de la morale sur la foi et au lieu d’être des repères de la morale, de faire le bien et éviter le mal, elles deviennent des terrains de conflits et d’affrontements entre fidèles.
Ces polémiques partent soit d’une mésentente due à la gestion des biens de ces églises, soit du mandat des organes de direction. Certains organes dirigeants au sein de ces églises ne veulent pas céder après l’expiration de leur mandat, ce qui provoque enfin de compte une confrontation qui laisse penser que l’intention n’est pas une bonne gestion mais plutôt des intérêts personnels qui tendent vers des détournements et l’appropriation des biens de ces églises.
Il s’observe également une implantation des églises dans des lieux qui ne sont pas conformes à la loi en vigueur comme les maisons d’habitation, des lieux servant de bistrots, des parcelles louées et souvent dans des abris de fortune en paille ou en bâches, mais aussi le non-respect des dispositions pertinentes relatives aux conditions d’agrément et de distanciation entre deux confessions religieuses distinctes.
Bien que les confessions religieuses soient des partenaires privilégiés dans l’organisation de la société et qu’elles doivent aussi participer dans le développement spirituel et socio-économique de leurs fidèles, leurs activités doivent suivre les normes en viguer tout en respectant l’objectif du Gouvernement de la pérennisation de l’ordre public, le respect de bonnes mœurs en garantissant les libertés publiques, etc.
III. CONTENU DU PROJET
Le présent projet de loi sous analyse est subdivisé en 73 articles répartis en 10 chapitres dont :
1. le premier chapitre parle du champ d’application et des définitions aux articles 1 et 2 ;
2. le deuxième chapitre traitant de la procédure d’agrément couvre les articles 4 à 14 ;
3. le troisième chapitre centré sur les statuts et les organes statutaires s’étend des articles 15 à 24;
4. le quatrième chapitre parle des droits d’une confession, organisation ou mouvement religieux et s’etale de l’article 25 à l’article 33 ;
5. le cinquième chapitre traitant du financement d’une confession, organisation ou mouvement religieux couvre les articles 34 à 42 ;
6. le sixième chapitre est relatif aux éléments du rapport annuel d’activités d’une confession, organisation ou mouvement religieux et est contenu dans les articles 42 et 43 ;
7. le septième chapitre parle des obligations d’une confession, organisation ou d’un mouvement religieux aux articles 44 à 60 ;
8. le huitième chapitre énonce le régime des sanctions, dans les articles 61 à 67 ;
9. le chapitre IX parle de la dissolution dans les articles 68 et 69 ;
10. le dixième et dernier chapitre est consacré aux dispositions transitoires et finales, articles 70 à 73.
IV. QUESTIONS POSEES AU REPRESENTANT DU GOUVERNEMENT AINSI QUE LES REPONSES DONNEES
QUESTION 1
Au niveau du paragraphe 2 de l’exposé des motifs, il est indiqué que depuis la promulgation de la loi sur les confessions religieuses, différentes églises ont manifesté un comportement qui trouble l’ordre public en transformant ces églises en terrain de conflit et d’affrontement entre leurs fidèles, et en déraillant de l’objectif principal d’être des repères de la morale, de faire le bien et d’éviter le mal.
Monsieur le Ministre,
REPONSE
Il est vrai que la loi en cours de modification prévoyait en son article 6 la mise en place d’un organe de régulation et de conciliation des confessions religieuses. Le dernier organe a été mis en place par l’ordonnance n°530/025 du 02 avril 2019 portant révision de l’ordonnance n°530/2181 du 08 décembre 2016 portant mesures d’application de la loi n°1/35 du 31 décembre 2014 portant cadre organique des confessions religieuses. Aux termes de l’article 3, l’organe est composé de sept membres dont cinq sont des leaders des confessions religieuses.
Les missions de l’organe relevant de l’article 5 montrent très bien que le Ministère s’était dépouillé de ses missions du moment que les confessions religieuses ont de par cette ordonnance les missions d’agréer d’autres. Nous avons constaté que cet organe a été la source de problèmes et de la multiplication des églises au lieu d’être réellement un organe de régulation et de conciliation.
A titre d’exemple, s’il surgissait des conflits liés souvent à des problèmes de leadership, cet organe proposait la séparation des protagonistes et la création de nouvelles confessions religieuses au lieu d’œuvrer pour l’unification. C’est ce qui a été en partie à l’origine de la multiplicité des églises. Les services du Ministère étaient dorénavant devenus des lieux des palabres et de résolution des conflits au lieu d’être réellement des services de suivi du fonctionnement des églises.
De plus, le fonctionnement même de cet organe était problématique du moment que selon l’article 10, les frais de fonctionnement étaient donnés par les confessions religieuses elles-mêmes de par la contribution trimestrielle de 30.000 Fbu.
REPONSE
Nous allons tout faire pour que les erreurs du passé ne se reproduisent plus. Avec cette nouvelle loi qui exige la conformité aux dispositions nouvelles comme le prévoit l’article 70 de ce projet de loi, toutes les conditions en rapport avec la procédure d’agrément devront être respectées, ce qui permettra de ramener les confessions religieuses à respecter la loi tant au niveau des conditions d’hygiène ou de l’emplacement.
QUESTION 2
La procédure d’agrément et de création d’une confession religieuse ou d’un mouvement religieux exige pas mal de documents, comme le précise l’article 4 du présent projet de loi.
Monsieur le Ministre,
REPONSE
Durant ces deux dernières années, les services du Ministère en collaboration avec l’administration territoriale ont travaillé et trouvé que certaines églises fonctionnent en violation de la loi et surtout en ce qui est des conditions d’agrément comme elles étaient mentionnées au chapitre III sur la procédure d’agrément et au chapitre V sur les obligations d’une confession religieuse.
Nous voudrions mentionner ici particulièrement que nous avons trouvé des églises qui organisent des cultes en utilisant des ordonnances d’agrément des autres églises ou qui utilisent des faux documents. C’est la raison pour laquelle, à travers tout le pays des actions ont été menées pour fermer les « églises » qui se trouvaient dans ce genre d’irrégularités. Des mesures administratives de fermeture ont été prises et les personnes impliquées dans la falsification des documents ont été présentées devant la justice.
QUESTION 3
L’article 42 prévoit qu’au plus tard le 30 septembre de l’année suivante, les confessions, organisations ou mouvements religieux sont tenus de transmettre au Ministre ayant les confessions religieuses dans ses attributions, un rapport annuel d’activités de l’exercice précédent.
Monsieur le Ministre, quelles sanctions envisagez-vous infliger aux confessions ou mouvements religieux qui ne fournissent pas leurs rapports d’activités dans les délais raisonnables ?
REPONSE
Une église ou confession religieuse qui ne voudrait pas fournir les rapports d’activités voudrait montrer au Ministère ayant les confessions religieuses dans ses attributions ainsi qu’à d’autres partenaires qu’elle ne travaille pas dans la transparence. La sanction dans de telles situations serait la suspension d’activités pour amener les responsables de ces églises de faire preuve de rendre compte tout en privilégiant le partenariat.
QUESTION 4
L’article 46 précise que chaque confession religieuse doit disposer de son propre lieu qui ne peut être construit dans les enceintes des établissements scolaires et interdit d’organiser des cultes pendant les heures de travail sans autorisation.
Monsieur le Ministre,
REPONSE
Une fois ce projet de loi adopté par le Parlement et promulgué par son Excellence Monsieur le Président de la République, nous n’aurons aucun problème à mettre en application cette disposition. Le travail déjà accompli par l’administration en collaboration avec la police lors des dernières opérations de vérification de la régularité des confessions religieuses et des églises dans les différentes provinces du pays prouve à suffisance que le travail sera aisé. Pour le moment, le Ministère dispose de la base des données sur les églises et les confessions religieuses ainsi que de leur cartographie d’implantation à travers tout le pays. Il y va de la responsabilité de chacun pour dénoncer ce qui pourrait constituer une entorse et l’optimisme au niveau du Ministère est considérable.
En plus de ce travail d’ordre administratif, nous fournirons des efforts particuliers dans le suivi en veillant à ce que des descentes régulières se fassent. Nous devrons désormais nous assurer que d’éventuelles nouvelles demandes d’agrément d’une confession religieuse ou d’un mouvement religieux soient analysées avant qu’on ait effectué des descentes physiques sur terrain afin de bien circonscrire l’emplacement et l’état des conditions d’hygiène parmi tant d’autres comme cela est exigé dans les conditions d’agrément et les obligations des confessions religieuses.
REPONSE
Le sort qui sera réservé aux églises qui ne respecteront pas les conditions exigées dans cet article est qu’elles verront leurs activités suspendues et le cas échéant, les ordonnances d’agrément leur seront retirées. Par ailleurs, des mesures ont déjà été prises quant au fonctionnement des églises utilisant des salles de réception ou des écoles.
Les nouvelles églises en quête d’agrément ne pourront pas obtenir la personnalité juridique si les conditions d’agrément, d’hygiène, d’ordre public, de distanciation ne sont pas respectées.
Parlant des églises qui ont déjà été agréées, elles bénéficieront d’une période de grâce de vingt-quatre mois à compter de la date de promulgation du présent projet de loi afin de leur permettre de se conformer aux conditions d’existence même d’une église au Burundi.
QUESTION 5
L’article 60 dispose que les célébrations et séances de prières animées par les confessions religieuses doivent respecter l’environnement, la quiétude de la population avoisinante, l’ordre public et interdit l’utilisation des instruments porte-voix.
Monsieur le Ministre,
REPONSE
La loi est mise en place en vue d’une application générale. La mise en application de ce projet de loi concernera toutes les églises afin de faire respecter l’ordre, la sécurité et la tranquillité de la population. L’idée de cet article est que toute église qui voudrait fonctionner sans respecter les dispositions de tel ou tel autre article sera sanctionnée conformément à cette nouvelle loi.
REPONSE
Si vous observez la perception des gens par rapport à la manière dont les prières sont organisées dans certaines églises, vous voyez qu’il y a un besoin de mettre de l’ordre dans ce secteur. Tout en reconnaissant la liberté de religion et de culte à la population, cette liberté doit être néanmoins réglementée dans l’intérêt de la population. Nous trouvons donc que chaque activité qui serait organisée en dehors de la réglementation rencontrerait la rigueur de la loi.
QUESTION 6
Il est indiqué à l’article 67 que les célébrations qui perturbent la quiétude des populations voisines et l’ordre public du lieu de culte entrainent la fermeture provisoire du lieu de culte.
Monsieur le Ministre, sur quels critères vous basez-vous pour affirmer qu’il y a perturbation de la quiétude des populations avoisinantes ?
REPONSE
Du moment que les célébrations religieuses atteignent le degré d’être considérées comme des tapages nocturnes qui eux-mêmes sont sanctionnées par la loi pénale, vous constatez que le Ministère ayant la gestion des confessions religieuses dans ses attributions ne peut pas rester les mains croisées. Nous exxhorterions les responsables des différentes églises et confessions religieuses à également se soucier de la population avoisinante à leurs lieux de cultes qui a également besoin d’un repos après avoir vaqué aux différentes activités.
V. AMENDEMENTS PROPOSES
V.1 Amendements de forme
N° | Matière amendée | Amendement | Motivation |
1. | Art. 5 litera f) | Commencer « Une » par une lettre minuscule, remplacer « dont » par « à laquelle » et effacer le « e » sur le mot « affiliée ». Le litera va s’écrire comme suit : « une lettre de recommandation délivrée par la confession religieuse à laquelle le mouvement ou l’organisation religieuse est affilié.» | C’est la meilleure forme |
2. | Art. 8 : 1ère ligne 3ème ligne | Remplacer le groupe de mots « les mouvements religieux et les organisations religieuses » par « les mouvements et les organisations religieux ». Remplacer « d’ » qui vient après le mot « autorisés » par « à » | Meilleure formulation C’est la grammaire qui convient |
3. | Art. 15, litera n) et p) | Supprimer systématiquement et respectivement le mot « religieuse » qui vient après le mot « confession » et les litera vont s’écrire comme suit : « n) le mode de dissolution et d’affectation du patrimoine de la confession, organisation et/ou mouvement religieux » ; « p) les modalités de résolution des conflits au sein d’une confession, d’une organisation et/ou d’un mouvement religieux » | C’est la meilleure forme |
4. | Art. 28, 50, 58, 65, 66, 67, 68, 69, 72 et 73 | Réduire l’espacement entre les numéros de ces articles et leur contenu. | C’est la meilleure forme |
5. | Art. 42 :1er alinéa, 1ère ligne 2ème ligne Alinéa 2, litera d) 1ère ligne 2ème ligne sur des | Ajouter un « s » sur le mot « mouvement ». Ecrire le mot « tenus » au lieu de « tenues ». Supprimer « s » sur le mot « des ». Supprimer le « s » sur le mot « quartiers ». | Erreur de saisie C’est la meilleure forme Idem Idem |
6. | Art. 45, 1ère ligne | Supprimer le « l’ » précédant le mot « autorisation ». | Idem |
7. | Art. 50, 1ère ligne | Mettre le « s » sur les mots « organisation » et « mouvement ». | Idem |
8. | Titres des CHAPITRES III et VIII | Espacer les doubles points et les chiffres romains indiquant les numéros des chapitres « III » et « VIII ». | Idem |
V.2 Amendements de fond
N° | Matière amendée | Amendement | Motivation |
1. | Art. 3 litera b) | Formuler la litera comme suit : « b) communauté musulmane : une confession religieuse fondée sur l’Islam. Elle est fondée sur une croyance unique en Allah ». | Meilleure formulation |
2. | Art. 4, litera h) | Supprimer le groupe de mots « de niveau licence ou » | Se conformer à l’article 54, alinéa 2 du présent projet de loi. |
3. | Art. 5, litera d) | Reformuler la litéra comme suit « l’attestation d’identité complète, le curriculum vitae, l’extrait du casier judiciaire de chaque membre du comité exécutif ainsi que trois lettres de recommandation des personnes de référence ;» | Chaque membre du comité exécutif doit présenter son propre dossier. |
4. | Art. 20, alinéa 2, 2ème ligne : – | Reformuler l’alinéa comme suit : « A l’expiration du mandat des organes dirigeants, la confession religieuse doit organiser des élections en vue de mettre en place de nouveaux organes. Si les organes en place refusent d’organiser les élections dans les délais, le Ministère ayant les confessions religieuses dans ses attributions se saisit du cas pour le respect de la régularité des dispositions légales et réglementaires ». | C’est pour éviter la tautologie. |
5. | Art. 22, 1ère ligne | Remplacer le mot « lui » par « leur » et l’alinéa s’écrit comme suit : « Le comité exécutif et le conseil d’arbitrage accomplissent les missions leur confiées par l’assemblée générale ». | Les missions sont confiées au comité exécutif et au comité d’arbitrage |
6. | Art. 50, 2ème ligne | Remplacer « celles » par « ceux »: et l’article va s’écrire comme suit : « Les conventions entre l’Etat du Burundi et les confessions, organisations ou mouvements religieux notamment ceux ayant des sièges à l’étranger peuvent être révisées sur demande de l’une des parties ». | Meilleure forme |
8. | Art.58, 2ème ligne | Supprimer la virgule après le mot « biens ». | Meilleure forme |
VI. CONCLUSION
Le projet de loi sous analyse intervient au point nommé. Les différentes irrégularités qui s’observent aujourd’hui dans certaines confessions religieuses ne proviennent pas de l’absence de la législation mais plutôt au non respect de la loi. C’est dans ce souci que le Gouvernement du Burundi apporte des innovations à la loi en vigueur pour trouver une solution durable aux problèmes qui hantent l’organisation et le fonctionnement des confessions religieuses.
Ces innovations permettront aux confessions religieuses qui posent des actes troublant l’ordre dans la société, d’adopter un comportement servant de repères de la morale, de faire le bien et d’éviter le désordre tendant à entrainer les chicaneries entre leurs leaders.
Pour toutes ces raisons, la Commission permanente chargée des questions institutionnelles, juridiques et des droits et libertés fondamentaux, qui fait d’abord siens les amendements de l’Assemblée nationale, demande à l’assemblée plénière du Sénat d’adopter le présent projet de loi tel que présenté.
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